Une nouvelle alliance a vu le jour dans notre communauté : il s’agit de l’Alliance Centre-Est. On vous explique pourquoi elle a été créée, les besoins auxquels elle répond, et comment on espère la voir se développer.
Qu’est-ce que l’Alliance Centre-Est ?
L’Alliance est la solution qu’ont trouvé trois organismes, Le Mûrier, la Maison St-Dominique et Suivi communautaire Le Fil, pour répondre aux besoins des personnes qu’ils desservent. Ces trois organismes spécialisés en services offerts aux personnes vivant des enjeux de santé mentale ont constaté que le réseau de la santé avait de la difficulté à tisser un filet social solide pour répondre à l’ensemble des besoins de la communauté. Les soins de santé mentale ne suffisent pas ; tous les déterminants de la santé doivent être considérés pour favoriser le rétablissement de la personne.
Logement, alimentation, forme physique, santé sexuelle et identité du genre ; toutes ces formes de soutien doivent accompagner la personne dans son parcours, en évitant de travailler en silo. En réunissant leurs expertises et leurs ressources, Suivi communautaire Le Fil, Le Mûrier et la Maison St-Dominique ont souhaité développer une approche globale. Marc Lopez, directeur général du RACOR, a été nommé coordonnateur de l’Alliance.
La mise en commun des services et leur financement
C’est grâce au Fonds de relance des services communautaires que ce projet a pu voir le jour : ce fonds est un investissement unique de 400 millions de dollars du gouvernement fédéral afin d’aider les organismes communautaires à s’adapter, à se moderniser et à renforcer leur capacité organisationnelle interne.
Chaque organisme de l’Alliance y apporte son expertise. La Maison St-Dominique y contribue avec ses services d’hébergement et d’habitation sociale ; un toit sur leur tête et une équipe qui offre différents types de soutien selon les besoins de la personne. Le Mûrier, avec son programme d’apprentissages culinaires Cuisinons ensemble, veille à la sécurité alimentaire des personnes, mais aussi à leur santé et leur autonomie. Suivi communautaire Le Fil a constaté depuis la pandémie une importante augmentation des besoins en lien avec la santé et la réappropriation du corps ; l’organisme a donc embauché une sexologue. Avec l’aide de M. Paquito Bernard, kinésiologue et chercheur au CRIUSMM, des étudiant(e)s à la maîtrise et au doctorat ont aussi été embauché(e)s pour veiller à l’activation motrice des personnes vivant avec un trouble de santé mentale, surtout qu’une part de cette population avance en âge. Éventuellement, l’Alliance aimerait se doter d’un(e) nutritionniste ; le Groupe PART a été approché. Une approche réellement globale !
Mutualisation : le défi de s’unir et d’intégrer cette philosophie au sein des équipes
L’adoption d’une structure commune a tout de même représenté un certain défi, selon Marc :
« Nos philosophies étaient déjà similaires, mais chacun avait élaboré ses propres outils et façons de faire ; il a fallu défaire certaines façons de faire qui n’étaient propres qu’à un organisme pour trouver des points de jonction. Ça a été un gros travail. »
Cependant, le coordonnateur y voit un avantage certain pour les intervenants et intervenantes des organismes membres de l’Alliance Centre-Est :
« Parfois, on n’a pas de relais avec le réseau de la santé, et on se sent démuni(e)s. En collaborant entre organismes communautaires, on réunit 2 ou 3 intervenant(e)s qui soutiennent la personne sur divers aspects de sa santé et de son bien-être. On gagne à diversifier les approches dans l’accompagnement de la personne : ce travail collaboratif permet la mise en commun de différents points de vue et l’exploration de nouvelles pistes de solutions.
Dans notre milieu, on a besoin de faire communauté, de permettre aux intervenant(e)s d’avoir un espace pour partager sur un suivi individuel. Nous croyons que ça allègera leur charge et que ça les protégera mieux contre la fatigue de compassion. »
Les organismes ont cheminé dans leur partenariat ; ils en sont désormais à mettre l’effort dans l’intégration de cette philosophie auprès de leurs équipes. « Il faut maintenant faciliter le partage de l’information au sein de l’Alliance. On souhaite que les intervenant(e)s s’approprient le projet, afin qu’ils et elles réfèrent les personnes d’un service à l’autre. Pour l’instant, ils et elles ne se connaissent pas suffisamment. La pénurie et le roulement de personnel sont aussi des enjeux qui nous obligent à redonner l’information. » Pour faciliter cette transmission des connaissances et de l’approche, il est nécessaire de présenter régulièrement à l’interne le projet, son mécanisme, et souligner l’importance d’en faire profiter les personnes que l’on accompagne.
L’objectif : une voie rapide vers les services communautaires
Pour avoir accès aux services de l’Alliance, il suffit d’entrer dans l’une de ces trois ressources : toute personne ayant accès à l’un de ces organismes peut ensuite bénéficier des autres services en en faisant la demande à son intervenant(e), comme l’explique Marc :
« Bien sûr, on a l’obligation de donner des services aux communautés plus large, mais l’objectif des organismes de l’Alliance Centre-Est, c’est que les références interalliances soient priorisées.
On souhaite éviter le modèle des listes d’attente au sein de notre Alliance. Une personne référée par un membre de l’Alliance sera traitée dans les plus brefs délais. On désire aussi donner accès à ces services aux personnes les plus vulnérables, celles qui n’ont plus de soutien psychosocial, qui n’ont plus de filet pour les soutenir (famille, équipe traitante, communauté). »
La cuisinière et les kinésiologues desservent d’abord l’Alliance ; si des plages deviennent disponibles, elles seront offertes ensuite à l’extérieur de l’Alliance. Pour les autres professionnel(le)s du projet – intervenant(e)s psychosociaux et sexologue – il s’agit d’une mise en commun des ressources internes des organismes.
Pérenniser le projet avec le soutien de la recherche
Une partie du financement va également à la recherche ; l’Alliance souhaite recueillir des données probantes pour documenter les pratiques et structures qui fonctionnent, et les succès qui peuvent être obtenus à l’aide de cette approche.
Ce chercheur, Mathieu Dostie, est associé au RACOR. Ce doctorant en anthropologie a un mandat de 6 mois recensera toutes les pratiques alternatives et répondra aux questions suivantes : quelle est l’adhésion des équipes ? le projet est-il viable à long terme ? Qu’est-ce que ça nous prend pour assurer sa pérennité ?
Ce projet, selon son coordonnateur, sera bénéfique aux membres du RACOR :
« Il n’est pas nécessaire de dupliquer ce qui se fait à l’Alliance ; on espère plutôt inspirer nos membres à réfléchir aux façons de mettre nos ressources en commun à travers un objectif très localisé. Les besoins de la communauté sont de plus en plus criants et diversifiés ; comment peut-on répondre au manque de services au niveau du réseau de la santé et des services sociaux ? C’est trop pour un seul organisme, mais en collaborant plus étroitement, on peut y arriver. Le communautaire est créatif et polyvalent : on peut générer d’autres modes d’accompagnement pour la population. »
Quelles sont ses aspirations pour l’avenir du projet ? « On souhaite ouvrir un espace commun de réflexion qui tienne compte des différentes dynamiques et réalités. Que cet espace permette l’élaboration de différents projets, avec des structures et des mécaniques inspirantes et adaptables aux besoins de chacun(e). » Le nouveau Pôle de l’Est est aussi un modèle inspirant pour le coordonnateur : pourrait-on éventuellement intégrer un ou des partenaires pour mettre en place d’autres volets, comme de l’insertion socioprofessionnelle, de la psychothérapie ou de l’art-thérapie, qui profiteraient à l’ensemble des gens que l’on accompagne?
Les réponses sont entre les mains du communautaire.
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